Le nouvel nouvel nouvel Hôtel-Dieu

Chers collègues,

Voici la suite du feuilleton de l’Hôtel-Dieu de Paris. Il a fallu oublier les fariboles de l’ancienne direction générale et le fameux “hôpital debout”. Il faut aujourd’hui prendre du recul à l’égard du pudding imaginé par l’actuelle direction générale. En effet, par une lettre diffusée hier et que vous trouverez ci-dessous, le professeur Loïc Capron nous apprend que désormais l’avenir de Hôtel-Dieu est placé en partie entre les mains de la Commission médicale d’établissement (CME) qu’il préside. Sans être trop optimistes, gageons qu’il en sortira un projet plus rationnel et moins dispendieux. Le vote de la CME est prévu au printemps 2015. Il est loin d’être acquis.

On aimerait savoir sur quels arguments repose le “principe” qui justifie de garder l’Hôtel-Dieu au nombre des hôpitaux de l’AP-HP. Selon le document joint à ce courrier et que vous trouverez également ci-dessous, tout se passe comme si on ne pouvait totalement transformer l’Hôtel-Dieu et renoncer à en faire un hôpital pour des raisons politiques, à cause notamment de la mairie de Paris, plus soucieuse de son image et de ses intérêts que de ceux de l’AP-HP (voir ici),  et comme si, pour des raisons médico-économiques, on ne savait trop quelles activités mettre ou laisser dans des bâtiments à rénover pour un investissement d’au moins 170 M€. Et tout cela au détriment des autres hôpitaux de l’AP-HP, dont les besoins sont pourtant criants.

In fine, l’addition risque d’être salée et pourra intéresser la Cour des comptes. Il sera trop tard.

Amitiés et bon courage.

Bernard Granger.

_______________________________________________________________________________

Chères et chers élus de la CME de l’AP-HP,

Notre directeur général a établi le principe que l’Hôtel-Dieu de Paris doit rester un hôpital de l’AP-HP ; sinon en totalité, du moins pour une part de ses surfaces.

À de nombreuses reprises, vous et moi avons exposé à M. Hirsch nos objections médicales et budgétaires à ce projet, mais nous sommes aujourd’hui devant une alternative :

  1. ou bien nous nous opposons à cette décision irrévocable et déclenchons une crise de gouvernance,
  2. ou bien nous prenons part au projet de l’Hôtel-Dieu qui, pour l’essentiel, reste à construire.

La première solution me semble trop chargée d’aléas pour vouloir vous y engager derrière moi : que ferons-nous quand le dialogue médico-administratif sera bloqué ?

La seconde voie n’est pas une capitulation sans condition :

  • nous acceptons la discussion, en restant fidèles à nos deux votes sur le sujet, qui ont établi (1) le respect scrupuleux de la qualité et de la sécurité des soins, et (2) le principe d’équilibre budgétaire strict ;
  • la CME crée un groupe de travail ad hoc sur le projet de l’Hôtel-Dieu, spécialement chargé de coordonner notre participation à l’élaboration du projet ;
  • je copréside avec le directeur général l’instance centrale de réflexion sur le futur Hôtel-Dieu ;
  • après un maximum de six mois de travail (avril 2015), la CME votera sur le projet qui lui sera soumis.

Telle est la position que j’ai défendue devant le directoire du 16 septembre en réponse à la proposition du directeur général (document joint) et avec l’appui de nos collègues présents (les Prs Ariane Mallat, Noël Garabédian et Benoît Schlemmer).

Face à l’urgence de rétablir la libre circulation des biens et des personnes entre l’Hôtel-Dieu et le reste de l’AP-HP, M. Hirsch m’a demandé un engagement rapide. C’est pourquoi je n’attends pas notre prochaine réunion pour vous informer de ma position et vous en décrire les motifs et conditions.

Avec mon plus cordial dévouement,

Loïc Capron
président de la commission médicale d’établissement
de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris

01 40 27 37 91

http://cme.aphp.fr/

_______________________________________________________________________________

L’Hôtel-Dieu de Paris

Document adopté par le directoire de l’AP-HP le 16 septembre 2014

Introduction

Si les investissements nécessaires pour l’Hôtel-Dieu n’ont pas été intégrés dans le PGFP examiné par les instances au mois de juillet 2014, il a été confirmé que l’instruction de ce projet serait poursuivie, sur la base des premières orientations discutées au conseil de surveillance de juin 2014, et en tenant compte de trois impératifs : la garantie de la qualité et de la sécurité des soins ; un Hôtel Dieu dont le compte d’exploitation ne soit pas déficitaire ; une mise aux normes qui n’obère pas les besoins de financements des autres projets de l’AP-HP, d’ores et déjà inscrits au PGFP. La commission médicale d’établissement a été particulièrement claire sur ces points et y sera, à juste titre attentive dans l’avenir.

Dans ce cadre, l’hypothèse d’une cession de l’Hôtel Dieu est close. En revanche, la mairie de Paris a fait connaître son accord, sur la base des premières orientations discutées, d’une modification du PLU rendant possible un projet d’ensemble. En effet, comme exposé au conseil de surveillance, le projet de l’Hôtel-Dieu comprendra plusieurs volets, au-delà du projet médical stricto-sensu.

– Des activités, qui sans être directement des activités de soins, sont utiles à l’ensemble des dimensions hospitalo-universitaires de l’AP-HP, comme la délégation à la recherche clinique, l’AGEPS, des centres de ressources (type GEROND’IF), qui pourraient gagner à être rassemblés sur un même lieu et trouveraient leur synergie avec des centres à vocation régionale et nationale ainsi qu’avec la chaire d’économie de la santé et la santé publique ; des espaces communs à l’AP-HP pour les conférences, réceptions, séminaires, mais aussi ouverts au public, avec une ouverture plus forte sur le parvis de l’Hôtel de Ville ; des questions, comme la localisation de l’école de chirurgie (et de formation des IADE/IBODE) restent ouvertes, en fonction d’une analyse des avantages/inconvénients par rapport aux autres localisations possibles.

– Des logements, en partenariat avec la ville de Paris, pourront inclure des logements sociaux, des logements étudiants, mais aussi, des logements spécifiques à l’AP-HP pour l’accueil de « visiteurs » dans le cadre des programmes internationaux de l’AP-HP.

– L’accueil d’activités liées à des partenariats avec la Ville de Paris, avec des organismes médico-sociaux, cohérentes avec la vocation de l’Hôtel-Dieu et dans un cadre conventionnel contribuant à son équilibre économique d’ensemble.

En ce qui concerne le projet médical, sans entrer dans les détails et préjuger de l’expertise et des concertations plus approfondies à réaliser, ce document, adopté lors du directoire du 16 septembre 2014, cadre la réflexion autour d’une dizaine de points, pouvant constituer la charpente du projet médical.

La commission médicale d’établissement sera associée, par ses représentants, aux réflexions conduites sur le projet médical, tout au long de ce processus, sachant que le projet global de l’Hôtel-Dieu devra associer l’ensemble des parties prenantes (notamment les partenaires sociaux en interne  à l’APHP, ainsi que les universités et leurs communautés, les EPST, avec bien sûr l’INSERM, les acteurs de la médecine de ville, la ville de Paris et l’agence régionale de santé).

 

Trame du projet médical soumise à concertation

  1. Hôtel-Dieu et urgences

La stratégie globale d’amélioration des urgences lancée en juin 2014 assigne à l’Hôtel-Dieu une place nouvelle dans le nouveau schéma des urgences de l’AP-HP en précisant plusieurs points :

  1. l’Hôtel-Dieu pourra répondre aux Parisiens qui ont besoin rapidement d’un avis ou d’une consultation médicale et qui aujourd’hui se rendent dans les services d’urgence, à défaut d’un recours mieux adapté à leurs besoins ; l’Hôtel-Dieu leur garantira une prise en charge plus rapide avec des médecins urgentistes, des médecins généralistes et des médecins spécialistes. Il contribuera donc à diminuer la « pression » sur les autres services d’urgence ;
  2. son plateau technique en imagerie (IRM, scanner, radiologie conventionnelle), avec de larges plages d’ouverture et des tarifs exclusivement en secteur 1, sans dépassement, pourra être à la disposition des patients ayant recours directement à l’Hôtel-Dieu, ou adressés par l’un des services de l’AP-HP ou par les médecins de ville ;
  3. l’Hôtel-Dieu sera organisé pour répondre à des urgences en psychiatrie, pour mieux orienter les patients présentant des problématiques de santé mentale, pour bien prendre en compte les difficultés des patients en situation de précarité ;
  4. lorsqu’un dispositif de régulation aura été contractualisé entre la Brigade des sapeurs-pompiers (BSPP) et le SAMU, l’Hôtel-Dieu pourra proposer un accès « régulé » aux patients adressés par les ambulances ou les véhicules de la BSPP, lorsqu’ils relèvent des services disponibles à l’Hôtel-Dieu ;
  5. l’Hôtel-Dieu restera le lieu d’ancrage du véhicule du SMUR et de l’équipe attachée à ce véhicule ;
  6. il gardera un lien de complémentarité avec le service d’urgences de Cochin avec une liaison dédiée entre l’hôpital Cochin et l’Hôtel-Dieu.

La mise en oeuvre de la stratégie globale des urgences a fait l’objet de groupes de travail, pilotés par la directrice de la DOMU et le Pr CARLI. Parmi ces groupes de travail, un groupe spécifique a été constitué sur l’organisation bi-site entre Cochin et l’Hôtel-Dieu, chargé de veiller à proposer les conditions de mise en oeuvre de ces orientations, en veillant à ce qu’elles soient conformes aux exigences de qualité et de sécurité des soins, tout en permettant de décharger les SAU de patients qui n’ont pas besoin de soins lourds.

Les garanties concernant la qualité et la sécurité des soins seront bien évidemment un élément décisif pour que des patients puissent être transportés à l’Hôtel-Dieu par des véhicules de secours et devront être étayées et, le cas échéant, donner lieu dans un premier temps à une phase expérimentale. La CME sera davantage associée à ces travaux.

Vers la mi-octobre, les conclusions de ces groupes de travail devraient être connues et permettre d’apporter des réponses aux interrogations concernant les moyens, les procédures et l’organisation.

  1. Centre de médecine ambulatoire

L’intérêt d’un centre de médecine ambulatoire se justifie par un triple besoin : les liens avec la médecine générale, un service rendu aux hôpitaux de l’AP-HP ; des besoins des patients.

Le projet doit être source d’innovations en vue de réduire le recours à l’hospitalisation, de favoriser les bons parcours de soins, de faire jouer la pluridisciplinarité (entre médecine générale, médecine spécialisée, imagerie et explorations fonctionnelles), de renforcer le lien entre médecine somatique et santé mentale, de tester de nouveaux modes de coopération entre médecine de ville et médecine

hospitalière, de développer une approche médicale, scientifique et indépendante des intérêts industriels de l’utilisation des nouvelles technologies de l’information au suivi des patients (médecine dite « connectée »).

Cela suppose de clarifier les attentes des médecins de ville à l’égard du projet, pour veiller à ce que le centre de médecine ambulatoire ne soit pas perçu comme un concurrent ou un supplétif à la médecine de ville. Une concertation plus formelle avec les syndicats médicaux, l’URPS ainsi qu’avec l’ARS pourra être conduite d’ici la fin du mois d’octobre.

S’agissant des consultations spécialisées, il s’agit avant tout de répondre à des besoins exprimés par les hôpitaux de l’AP-HP.

Cette médecine ambulatoire doit être universitarisée (formation et recherche). Cette activité doit être évaluée (du point de vue médico-économique).

  1. Hospitalisation à domicile

Outre la localisation à l’Hôtel-Dieu du siège de HàD, l’intégration de cette activité à l’Hôtel-Dieu doit permettre de mieux développer l’HàD avec la médecine de ville, avec les urgences, avec la médecine ambulatoire.

  1. Santé publique et économie de la santé

La chaire d’économie de la santé (avec l’URC Éco) et l’unité d’épidémiologie et de biostatistiques (et les équipes liées à cette unité) permettent de constituer un noyer d’équipes de santé publique/économie en partenariat avec l’INSERM, les universités et d’autres organismes.

  1. Éducation thérapeutique

L’éducation thérapeutique peut avoir sa place à l’Hôtel-Dieu dès lors qu’elle ne remet pas en cause la nécessaire proximité entre les soins et le lieu de formation. Elle se justifie dans un projet plus global incluant l’Institut du Patient, proposé par la FHF, et un projet articulé avec la médecine de ville.

  1. Santé mentale

La dimension santé mentale s’appuie d’abord sur l’activité de psychiatrie d’urgences déjà présente à l’Hôtel-Dieu, pouvant venir en appui du centre d’accueil en urgences, s’articulant avec la consultation médico-judiciaire. Elle peut être élargie à d’autres dimensions ; des propositions ont été faites qui méritent d’être approfondies et partagées.

  1. Soins de suite et de rééducation et long séjour

Ces activités peuvent s’inscrire dans une vision globale du SSR et du SLD dans Paris intra-muros, avec l’avantage d’une localisation au coeur de Paris, très facilement accessibles aux familles et pouvant poursuivre la stratégie d’humanisation de ces activités.

Ce projet doit être d’abord étudié sous l’angle de la faisabilité (normes ; adéquation des peignes de l’hôtel Dieu ; coûts) en même temps que sa cohérence avec les autres projets dans ce domaine.

  1. Lits halte soins de suite

Cette activité, qui relève du médico-social, peut trouver sa place à l’Hôtel-Dieu, en cohérence avec les besoins exprimés par nos partenaires (ville de Paris, SAMU social) et la présence d’une PASS (pouvant être renforcée) d’un centre d’accueil d’urgences.

  1. Prévention

La dimension « prévention » peut se trouver logiquement dans les projets de la chaire HOSPINNOMICS, de l’unité d’épidémiologie et de biostatistique, dans le renforcement de l’espace santé jeunes, dans l’accueil de la médecine universitaire, mais aussi dans le centre de médecine ambulatoire, dans l’éducation thérapeutique (et préventive), des projets thématiques autour de l’activité physique et de la nutrition, du « bien vieillir » ; il s’agit de concevoir la prévention telle qu’elle peut s’intégrer dans le projet d’un grand CHU, dans un site particulièrement connecté avec la médecine de ville.

    10.  Articulation avec les groupes hospitaliers

La question d’une autonomie de l’Hôtel-Dieu par rapport à un groupe hospitalier spécifique ou de l’intérêt de le maintenir rattaché à un groupe hospitalier (HUPC) reste ouverte et sera tranchée en tenant compte de la part respective des activités médicales qui concernent l’ensemble de l’AP-HP.

L’Hôtel-Dieu de Paris, gouffre financier

Chers collègues,

Vous trouverez ci-dessous la lettre adressée par le Pr Claire Le Jeunne au sujet du matériel hôtelier et médical “séquestré” à l’Hôtel-Dieu et faisant défaut aux malades du service de médecine interne de l’hôpital Cochin. C’est un exemple des multiples gaspillages engendrés par la gestion politicienne actuelle et passée du dossier de l’Hôtel-Dieu. Cette dilapidation des deniers publics survient dans une période où les hôpitaux sont de plus en plus déficitaires (voir ici) et sont de moins en moins capables d’assurer des soins accessibles et de bonne qualité.

Alors que dans le contexte économique actuel il faudrait gérer au mieux les moyens alloués à l’AP-HP, par des décisions politiques engageant les élus parisiens de tous bords et le ministère de la Santé, on maintient sous perfusion financière un établissement qui n’a plus de raison d’être et dont la fermeture est évoquée depuis plus de vingt ans. Son déficit est estimé à 5 à 10 millions d’euros pour 2014.

On nous annonce un énième projet pour l’Hôtel-Dieu, dont les bribes déjà entrevues laissent supposer qu’il sera aussi hétéroclite et creux que les précédents, appelés “hôpital debout”, “hôpital universitaire de santé publique”…

La mairie de Paris porte une lourde responsabilité dans cette gabegie, qui en cache d’autres. Ses décisions concernant l’AP-HP dans le domaine immobilier viennent d’être fortement critiquées dans un tout récent avis du Conseil de l’immobilier de l’Etat : ” […]il semble que le maire de Paris, président du Conseil de surveillance, ait plus agi pour défendre les intérêts de la ville que ceux de l’Assistance publique ; que la ville de Paris a, au demeurant, peu contribué au financement des investissements de l’AP-HP mais su préserver ses propres intérêts financiers dans le cadre des opérations de restructuration urbaine consécutives aux programmes de reconversion des grands établissements hospitaliers intra-muros.” On y lit aussi que “s’agissant du projet de restructuration médicale de l’Hôtel-Dieu, les activités médicales lourdes ont été finalement regroupées sur le site de Cochin pour répondre à une volonté médicale et car la vétusté et l’inadéquation des locaux étaient telles qu’il était inconcevable de procéder à une modernisation de l’hôpital”.

Avant l’intérêt de l’AP-HP, donc des malades, la mairie de Paris défend ses propres intérêts et ne donne pas au CHU francilien les possibilités de développement que lui permettrait une gestion plus profitable de son patrimoine  immobilier.

Concernant l’Hôtel-Dieu, afin  de complaire à la mairie de Paris, dont la direction générale de l’AP-HP est politiquement proche, on en est à vendre les bijoux de famille pour financer un projet très probablement déficitaire ! Tout cela contre l’avis de la communauté médicale, et au détriment des autres hôpitaux de l’AP-HP, soumis années après années à davantage de privations.

La lettre ci-dessous a été lue hier lors de la réunion de la Commission médicale d’établissement de l’AP-HP. Elle a laissé honteuse et sans voix la direction générale.

Amitiés et bon courage.

Bernard Granger.

_____________________________________________
De : LE JEUNNE Claire
Envoyé : lundi 8 septembre 2014 14:56
À : GRANGER Bernard
Objet : déménagement hôtel Dieu

Mon cher Bernard

Comme je te le disais , au moment de la fusion des services de médecine interne, il avait été convenu que les équipements du service de médecine interne ( mobiliers de chambre et matériels de soins , scope, dynamap, seringues électriques …) soient également déménagés avec le personnel , ce matériel devant équiper la salle supplémentaire et permettre de rénover du matériel local un peu vétuste.

Le 4 août 2013 alors que le personnel avait préparé ce déménagement avec beaucoup d’efficacité et de compétence, des personnes de la CGT se sont opposées au déménagement et ont en gros séquestré le matériel après avoir défait tout l’empaquetage préparé par le personnel du service, non sans heurt et sans une amertume très forte de nos infirmières et aides-soignants.

La deuxième salle qui devait être déménagée début Novembre a subi le même sort , de même que le matériel de bureau dans les secrétariats de médecine interne au 5° étage aile A bâtiment B.

Depuis tout ce matériel vieillit et n’est pas utilisé. Sur place à Cochin nous avons dû faire comme on pouvait en récupérant du matériel plus ou moins neuf et dépareillé de droite et de gauche pour équiper à la hâte les salles d’hospitalisation. Il y a aujourd’hui encore des chambres sans fauteuil pour les patients et les infirmières nous demandent régulièrement où en est le matériel dont elles ont besoin. Chaque fois que cette hypothèse est évoquée auprès de l’administration la réponse est négative on ne peut pas faire de vague à l’hôtel Dieu

De ce fait nous sommes obligés d’acheter avec les maigres ressources du Pole des équipements qui dorment à l’hôtel Dieu.

Voilà ce que l’on appelle faire des économies….

Tout ceci est triste

Amicalement

Claire LE JEUNNE

Chef de Service Médecine interne

Chef de Pôle Médecine Urgences Psychiatrie

GH Broca Cochin Hôtel Dieu

27 rue du Fbg St Jacques

75014 PARIS

Pensée d’État et intérêt général

Chers collègues,

Une interview du constitutionnaliste Dominique Rousseau par Mediapart. Ses propos illustrent bien ce qui cloche avec les lois Bachelot et Touraine.

Extrait : “ Un autre élément très important de cette crise de régime est que ceux qui nous gouvernent sont enfermés dans ce que j’appelle une « pensée d’État ». Ce sont des énarques très compétents, mais formatés à penser les choses de la société à partir d’un a priori sur ce qu’est l’intérêt général. Ils estiment que les citoyens sont incompétents pour définir ce qu’est l’intérêt général de la société et jugent donc normal de définir eux-mêmes ce qu’il est. C’est une pensée tragique pour la France qui a aujourd’hui besoin d’une « pensée de la société. »

Les « gens » sont capables, si on les laisse s’exprimer et délibérer, de produire des règles, de trouver l’intérêt général. Ce ne sera sans doute pas le même que celui produit par la promotion Voltaire, mais ce sera à hauteur des expériences vécues par les gens. La démocratie n’est pas une question d’arithmétique, mais une question d’expériences de vie. Or notre société raisonne à partir d’une pensée d’État abstraite, au moment où elle a besoin d’une pensée des expériences.

Dans les dernières années, toutes les questions importantes ont été sorties non par des députés, mais par les lanceurs d’alerte. La société est capable de mettre sur la place publique non seulement les questions qui font problème, comme la santé, l’alimentation, le logement, mais elle est aussi capable de produire des réponses, d’imaginer des règles nouvelles pour l’intérêt général.”

Amitiés et bon courage.

Petite revue de presse de rentrée

Chers collègues,

Voici quelques références qui vous intéresseront peut-être.

– Comprendre la sérendipité, ou pourquoi, selon Balzac, « le hasard ne visite jamais les sots ».

– Pourquoi les employeurs financent-ils les assurances santé aux Etats-Unis ? Ce système paraît de plus en plus illogique selon U. W. Reinhardt, qui publie une tribune dans le NYT. C’est sans doute parce qu’il est illogique que ce système s’installe en France.

– Il faudrait donner aux brevets des nouvelles molécules une durée adaptée aux pathologies soignées, sinon les traitements dont les résultats ne peuvent s’évaluer qu’à long terme ne feront jamais l’objet de recherches pharmaceutiques (voir ici).

– Excellente tribune de J.-P. Vernant sur le prix des médicaments (voir ici pour les USA).

– Les données personnelles deviennent un marché en pleine expansion (voir ici ou ), y compris les données personnelles utilisées pour prévoir la consommation de soins (voir ici) ou les données de santé, avec la vogue du moi quantifié (voir ici).

– Les données de santé française visées par les « statactivistes », les industriels et assureurs : quelques éléments du débat, et une réforme en vue à travers la loi de santé, dangereuse pour la confidentialité et le secret médical (Données de santé projet de loi sante août 14). Aux Etats-Unis, certains s’y intéressent aussi, comme J. Bush, président d’Athenahealth, dans The Atlantic.

– Le fameux impact factor vit-il ses derniers moments et va-t-on s’intéresser au contenu des articles pour évaluer les chercheurs ? Dans son remarquable blog consacré à l’édition médicale et scientifique, Hervé Maisonneuve invite à signer laDeclaration on Research Assessment, comme l’ont fait de nombreux chercheurs ainsi que l’INSERM et le CNRS.

– Une fois publiés, certains résultats sont (re)revus par les pairs, et les éventuelles erreurs rapidement débusquées et dénoncées sur Internet (voir ici).

– Pour The Lancet,  le classement des meilleurs hôpitaux des USA nous interroge surtout sur les pires. Aux USA toujours, pays où on gagne plus à gérer les soins qu’à les dispenser (les médecins y ont des rémunérations inférieures à celles des « managers »), un étudiant en médecine veut s’attaquer à un médecin ultra-médiatique, le Dr Oz, dont les avis ne sont pas toujours très pertinents (voir ici). Il aurait de quoi faire ailleurs aussi.

Obamacare : accusée d’être un « job killer », la réforme du système de santé américain a au contraire accéléré la création d’emplois dans le secteur de la santé, selon Forbes ; l’effet sur le pourcentage de non-assurés est déjà important, comme l’indique P. Krugman, qui, plus généralement, dans une tribune intitulée « Zéro sur six » constate que les prévisions des adversaires de l’Obamacare ne se réalisent pas.

– Les médecins évalués et étoilés comme les hôtels et les restaurants par des patients plus ou moins objectifs, voire rétribués : voir ici.

L’atlas démographique 2014 du conseil de l’ordre des médecins donne notamment les effectifs de chaque spécialité, leur répartition géographique, par mode d’exercice, et la pyramide des âges.

– Le rapport intégral de l’Inspection générale des finances sur les professions réglementées mediapart.fr/files/RAPPORT_…

– Restons mesurés face aux promesses des Big Data, ou mégadonnées en bon français (ici pour la prévision pas toujours fiable des épidémies de grippe, ici pour les essais cliniques en Angleterre facilités par les données détenues par le NHS,  pour aider les étudiants en difficulté), et face à celle de la e-santé (ici pour un panorama général, pour un exercice concret avec le m-patient hypertendu).

– Transparence et accès au dossier médical : attention à ce que vous écrivez, nous met en garde The Economist.

– Quelques réflexions éclairantes sur l’art de diriger (1, 2 et 3).

– Mauvais management : l’art de mal gérer son temps ou de compliquer ce qui est simple. Faut-il interdire les réunions et supprimer les niveaux intermédiaires inutiles ? The Economist redécouvre la lune. Bien payer ses employés et les laisser travailler tranquillement, sans les surveiller comme le lait sur le feu, reste ce qu’il y a de plus efficace, selon Le Monde.

– La coordination des soins réelle et efficace passe avant tout par la communication de médecin à médecin, et non par des usines à gaz technocratiques, comme le montre le cas décrit par le Dr M. J. Press dans le NEJM.

– Comment allouer les ressources en santé, entre décisions politiques et médecine fondée sur les preuves (voir ici) ?

 – La rémunération à la performance ne fait pas la preuve de son utilité à long terme (42 mois) selon une étude menée en Angleterre sur 34 hôpitaux ayant participé au programme de rémunération sur indicateurs de qualité et 137 hôpitaux constituant le groupe contrôle (voir ici).

– Le retour à l’équilibre du CHU de Brest passe par le gel d’une vingtaine de postes de praticiens hospitaliers, selon le Quotidien du Médecin. Plus globalement, selon la FHF, en 2013 les comptes des hôpitaux publics vont encore se dégrader, et lessuppressions d’emploi sont encore au programme pour 2015. Par ailleurs, l’ATIH vient de publier un rapport montrant le peu de fiabilité des états des prévisions des recettes et des dépenses (EPRD) et des plans globaux de financement pluriannuel (PGFP) des établissements publics de santé pour la période 2008-2012.

 – La future loi de santé (loi Touraine) ne soulève aucun enthousiasme chez les représentants des médecins hospitaliers (voir ici et ). Le Mouvement de défense de l’hôpital public n’est pas en reste. Nous y reviendrons.

– Et toujours l’opposition entre la médecine de papier, celle des bureaucrates, et la médecine de terrain, celle des cliniciens, des soignants et des patients (voir letexte d’Elie Azria sur la standardisation du soin médical, et le formidable blog de notre consœur Armance sur l’évaluation standardisée).

Amitiés, bon courage et excellente rentrée !